La promotion des compléments alimentaires sur les réseaux sociaux : source fiable ?
- estellenutrition
- 3 avr. 2022
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 10 avr. 2022
Le secteur des compléments alimentaires est une vraie jungle. Mille et une marques, mille et un produits : on ne sait plus quoi choisir. Et si on se renseignait sur Internet ? Manque de chance, encore une fois, mille et une informations.
Entre allégations vérifiées et marketing commercial, comment s’y retrouver ?
En 2010, les Français ont dépensé plus d’1 milliard d’euros en compléments alimentaires. (Parenti, 2011) Et en 2018, le marché des compléments alimentaires représentait près de 2 milliards d’euros. (La DGCCRF, 2020)
Pourtant, si nous ne sommes pas un minimum renseigné, leur consommation peut s’avérer dangereuse. Effectivement, il faut éviter les risques de surdose ou encore les mauvaises associations d’actifs.
Pourquoi un tel engouement autour des compléments alimentaires ? Pourquoi faut-il également se méfier de ces derniers et de leur publicité ? Qui croire ?
Ces dernières années, il y a eu une montée du marché des compléments alimentaires car l’alimentation moderne, même si équilibrée, ne permet plus d’apporter des nutriments en quantité suffisante. Réchauffement climatique et mode de culture sous serre en sont les principales causes.
Dans une ère où tout le monde se renseigne sur les réseaux sociaux, nous nous mangerons sur la problématique suivante : la promotion des compléments alimentaires sur les réseaux sociaux, source d’information fiable ou manque d’expertise ?
Pour étudier ce sujet, nous commencerons par développer les pours et les failles des règlementations des compléments alimentaires. Puis, nous traiterons également les règles et les failles de la communication de ces derniers sur les réseaux.
Développement I / Règlementations : les pours et les failles des compléments alimentaires.
A) Protection DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) Pour promouvoir des compléments alimentaires il y a des règles. Premièrement, ils nécessitent une autorisation de mise sur le marché fournie par la DGCCRF. La véracité des allégations sont contrôlées par la DGCCRF. De même pour la qualité des compléments alimentaires. Malheureusement, les allégations sont parfois trompeuses et trop prometteuses. Aujourd’hui, sur les réseaux, les compléments alimentaires sont revendiqués comme des magiciens de la perte de poids, du sommeil, du stress, ou encore de vraies pathologies. Le souci est que les compléments alimentaires ne sont pas des médicaments et que des effets thérapeutiques sont bien trop souvent alloués aux compléments alimentaires. (Annexe 1) Effectivement, pour les mêmes plantes utilisées, certains dosages seront autorisés dans les compléments, d’autres non. A dose élevée, certains suppléments ne sont plus présents pour répondre à des carences alimentaires, mais à une pathologie. Heureusement, il y a certaines marques qui indiquent qu’il faut respecter les dosages prescrits et qu’une utilisation autre que celle recommandée doit être soumise à un avis médical. D’après la DGCCRF, face à la crise de la Covid-19, beaucoup d’opportunistes ont fait la promotion de compléments miracles sur les réseaux (Annexe 3). Ils ont prétendu que leurs compléments pouvaient protéger ou guérir de la maladie. Beaucoup de produits ont été vendus parce qu’ils étaient promus comme « boosters du système immunitaire ». Les vendeurs n’ont pas hésité à reprendre la sémantique médicale pour construire leurs allégations marketing. Ils sont allés jusqu’à cette allégation : « Approuvés par l’OMS ». Heureusement la DGCCRF a su réagir car les compléments alimentaires sont des produits sérieux et bien contrôlés par eux. Il y a eu une mise en place d’une autorité de contrôle par la Commission européenne, soutenue par la DGCCRF. Cela prouve que la communication et la fabrication des compléments n’est pas laissée au hasard et qu’il y a une expertise derrière. « Ainsi, une trentaine de sites internet et d’opérateurs,
français comme étrangers, ont été contrôlés par la DGCCRF dans le cadre de cette opération. À l’issue des investigations menées, ces sites ont été enjoints de supprimer les allégations thérapeutiques trompeuses et de modifier leur communication. Près de 80% d’entre eux, y compris les sites étrangers, se sont mis en conformité. » (DGCCRF, 2020) Ces points soutiennent l’idée que les compléments alimentaires sont fiables en eux-mêmes et que leur communication sur les réseaux devrait donc être fiable puisque les produits en eux-mêmes ne sont pas contestables.
B) Failles et manque d’expertise
Aux États Unis, les compléments alimentaires ne sont pas tous réglementés par la FDA (Food and Drug Administration). Certaines marques de compléments alimentaires américaines mettent en avant sur leurs réseaux, des photos, des allégations, prouvant des résultats bluffants ou mettent tout simplement en avant des compléments alimentaires mais la marque de ces compléments n’a pas été vérifiée ou soumise à un laboratoire expert.
Beaucoup de produits manquent de tests indépendants. (al, 2020)
A titre d’exemple, on peut citer les produits contenant du cannabidiol (CBD). Il y a eu beaucoup de commercialisation illicite aux Etats-Unis. La FDA a été contrainte d’envoyer des lettres d’avertissement aux revendeurs qui faisaient une promotion trompeuse de ces compléments sur les réseaux sociaux. Kimberly G Wagoner,Allison J Lazard, E Alfonso Romero-Sandoval, Élisa A Reboussin ont mené une étude qui avait pour but d’analyser ces lettres de la FDA. Les résultats de l’étude sont les suivants : « Sur les 39 lettres d'avertissement émises, 97 % concernaient des violations commises sur les sites Web de l'entreprise et 56 % concernaient des comptes de médias sociaux. ». (Wagoner, 2021)
Malgré les efforts mis en place pour lutter contre cela, la FDA ne lutte pas indéfiniment contre cela et les revendeurs ont très bien pu remettre leurs allégations quelques jours plus tard.
On ne sait pas combien de temps il a fallu pour que les changements sur les réseaux soient effectués. Pendant ce temps de latence, la promotion était trompeuse et des clients ont pu lire des choses fausses. Cela témoigne des failles du système et du manque d’expertise des publicités sur les réseaux sociaux.
Pour citer mes recherches personnelles, je me suis aperçue que sur de nombreuses pages de marques de compléments alimentaires (Instagram, TikTok, Pinterest ...), les instructions de dosage sont confuses, les produits ne sont pas tous soumis à des études cliniques. Si les études cliniques sont établies, elles sont souvent faites en interne donc ce n’est pas fiable. Des conseils de prétendus diététiciens ou naturopathes sont mis en avant sur les réseaux sous les photos de produits, cependant on ne sait pas si ces affirmations sont vraies, ou si les personnes sont réellement diplômées.
II / Règles et failles de la communication
A) Les règles
Pour introduire les règles de la communication, commençons par ce qui est autorisé :
Il est possible de faire de la publicité sur les réseaux sociaux seulement si les compléments alimentaires disposent d’une autorisation de mise sur le marché délivrée par la DGCCRF.
Les compléments doivent être commercialisés comme des denrées alimentaires et présentés sur les réseaux comme tels. Ensuite, les produits doivent être dénommés « compléments alimentaires ». Retrouvez en Annexe 2, le processus d’entrée sur le marché des compléments alimentaires.
Nous avons mentionné dans la première partie la difficulté de communiquer sur des allégations santé propres aux produits. Les allégations sont en fait parfois autorisées si elles peuvent être justifiées par des preuves d’efficacité.
Normalement, la règle dans la communication et la promotion des compléments sur les réseaux est que les informations diffusées doivent être véridiques et loyales. Il est interdit d’induire le client en erreur.
Pour continuer sur la voie des interdictions désormais :
Il est évidemment interdit, d’allouer au produit des fonctions ou caractéristiques qu’il ne possède pas.
On ne peut apparemment pas dire qu’un régime alimentaire équilibré n’est pas une source suffisante de nutriments.
On ne peut pas dire qu’un produit est spécial parce qu’il présente des caractéristiques particulières alors que tous les autres produits du marché les présentent aussi.
Enfin, on ne peut utiliser les réseaux sociaux pour faire la promotion des compléments seulement si l’on respecte le cadre des allégations.
B) Les failles
Attention à l’arnaque ! Sur des réseaux sociaux, on peut lire des mentions comme « Consommé dans le cadre d’un programme minceur, il soutient le drainage. » Cette mention m’a suscité des interrogations : Qu’est-ce qu’un programme minceur ? Cela peut-il dire que le complément ne fonctionne pas si on ne se place pas dans une démarche de perte de poids ? C’est assez confus et représente un manque d’expertise.
Il a été remarqué que certaines marques mettent des allégations autorisées sur les sites e-shop et les réseaux sociaux. Cependant, les allégations transmises sur les documents fournis aux revendeurs des marques sont limites et utilisent la sémantique médicale. La promotion sur les réseaux est alors fiable mais à quel prix ? Selon moi on se rapproche d’un certain « Greenwashing ».
La liste des allégations santé autorisées se retrouve sur le site de la Commission européenne. (Les compléments alimentaires, nécessité d'une consommation éclairée, 2021)
Pour finir sur les failles de la communication sur les réseaux, nous pouvons la grande sphère des influenceurs. Beaucoup d’influenceurs sont payés pour parler positivement d’un produit alors même que ce dernier n’a pas été testé par eux. Des photos avant/après sont postées mais il n’y a aucune preuve qu’il s’agit du résultat de la cure.
Conclusion
Tout au long de ce travail de recherche, nous avons tenté de savoir si la promotion des compléments alimentaires sur les réseaux sociaux était une source fiable ou l’objet d’un manque d’expertise. Entre véracité et manque d’expertise, difficile de choisir. Mon avis est très mitigé.
Pour ce faire nous avons tout d’abord dans développé les pours et les failles de la réglementation des compléments alimentaires. Nous sommes passés par l’introduction d’institutions comme la DGCCRF ou la FDA.
Dans une seconde partie nous avons traité les règles et les failles de la communication sur les réseaux sociaux. Il existe un certain nombre de règles quant aux autorisations des mentions communicables sur les réseaux. Cela nous a permis de constater que beaucoup de marques de compléments ne respectent pas ces règles sur les réseaux.
Après avoir disséqué plusieurs études, les résultats sont assez controversés. D’un côté nous avons vu que les compléments alimentaires sont encadrés par de grandes institutions comme la DGCCRF, que la mise sur le marché nécessite une autorisation, que l’utilisation des allégations de la sémantique médical n’était pas autorisée. Cependant on retrouve tout de même aujourd’hui des publicités mensongères, des allégations santé utilisées illégalement, et des conseils d’utilisation plus ou moins clairs.
Il serait intéressant de faire passer des messages de prévention publique sur les compléments alimentaires car finalement, jusqu’à quel point sont-ils bénéfiques ?
Résumé en anglais Throughout this research work, we tried to find out whether the promotion of food supplements on social networks was a reliable source or the subject of a lack of expertise. Between veracity and lack of expertise, difficult to choose. My opinion is very mixed. To do this, we first developed the pros and cons of the regulation of food supplements. We went through the introduction of institutions like the DGCCRF or the FDA. In a second part we dealt with the rules and flaws of communication on social networks. There are a number of rules regarding the authorization of mentions that can be communicated on the networks. This allowed us to see that many brands of supplements do not respect these rules on the networks. After dissecting several studies, the results are quite controversial. On one hand, we have seen that food supplements are supervised by major institutions such as the DGCCRF, that marketing requires authorization, that the use of medical semantic claims was not authorized. However, today we still find misleading advertising, health claims used illegally, and more or less clear instructions for use. It would be interesting to convey public prevention messages on food supplements because in the end, how beneficial are they? 9
Annexes Annexe 1 : Le positionnement du complément alimentaire Source : Synadiet 10
Annexe 2 : Règlementation concernant la vente de compléments alimentaires. Source : Vitalya 11
Annexe 3 : Comment la crise de la Covid-19 stimule le segment des compléments alimentaires. Source : Pepswork 12
Bibliographie al, P.-S. e. (2020, Décembre 13). Récupéré sur PubMed: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33447491/ DGCCRF. (2020). Récupéré sur Economie.gouv: https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/la-dgccrf- protege-les-consommateurs-contre-les-complements-alimentaires-miracle#_ftn1 La DGCCRF. (2020, Aout 13). Récupéré sur Ministère de l'économie, des finances et de la relance: https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/la-dgccrf-protege-les-consommateurs-contre-les- complements-alimentaires-miracle#_ftn1 Les compléments alimentaires, nécessité d'une consommation éclairée. (2021, Février 8). Récupéré sur Anses: https://www.anses.fr/fr/content/les-compléments-alimentaires-nécessité-dune- consommation-éclairée Parenti, C. D. (2011, Janvier 26). Le Point Santé. Récupéré sur LePoint: https://www.lepoint.fr/sante/la- jungle-des-complements-alimentaires-26-01-2011-130159_40.php Wagoner, K. G. (2021, Juin 17). Récupéré sur PubMed: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34142863/ 13
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